351 Croix lumineuse au dessus du Golgotha à Jérusalem

La deuxième chiasmophanie de l'histoire, est la croix qui apparut au dessus du lieu de la crucifixion du Christ, le 7 mai 351. C'était un puissant symbole, qu'on a évidemment interprété comme un miracle. Ce "miracle" survint l'année même ou Cyrille de Jérusalem fut nommé évêque. Il est donc bien normal que Cyrille y ait vu une approbation divine, et en ait fait la promotion. C'est ce qu'il fit dans une lettre à l'empereur Constance II, fils de Constantin, qui venait de battre l'usurpateur Magnence.

Nous donnons le texte grec, chaque fois que possible, mais les traductions sont de Louis Cousin, dans son Histoire de L'église de 1676. Ces traductions ne suivent malheureusement pas le texte d'assez près.

351. Le récit de Cyrille de Jérusalem

Ἐν γὰρ ταῖς ἁγίαις ἡμέραις ταύταις τῆς ἁγίας πεντηκοστῆς, νόνναις μαΐαις, περὶ τρίτην ὥραν, παμμεγέθης ὁ σταυρός, ἐκ φωτὸς κατεσκευασμένος, ἐν οὐρανῷ, ὑπεράνω τοῦ ἁγίου Γολγοθᾶ μέχρι τοῦ ἁγίου Ὄρους τῶν ἐλαιῶν ἐκτεταμένος ἐφαίνετο· οὐχ ἑνὶ καὶ δευτέρῳ μόνον φανείς, ἀλλὰ παντὶ τῷ τῆς πόλεως πλήθει φανερώτατα δειχθείς· . οὐδ' ὡς ἄν τις νομίσειεν ὀξέως κατὰ φαντασίαν παραδραμών, ἀλλ' ἐπὶ πλείοσιν ὥραις ὑπὲρ γῆν ὀφθαλμοφανῶς θεωρούμενος, καὶ ταῖς ἀπαστραπτούσαις μαρμαρυγαῖς τὰς ἡλιακὰς ἀκτῖνας νικήσας (ἦ γὰρ ἂν ὑπ' αὐτῶν νικώμενος ἐκαλύπτετο, εἰ μὴ δυνατωτέρας ἡλίου τοῖς ὁρῶσι παρεῖχε τὰς λαμπηδόνας)· ὡς ἅπαν μὲν ἀθρόως ἐξαυτῆς εἰς τὴν ἁγίαν ἐκκλησίαν συνδραμεῖν τῆς πόλεως τὸ πλῆθος, τῷ τῆς θεοπτίας φόβῳ μετ' εὐφροσύνης κατασχεθέν, νέων ἅμα καὶ πρεσβύτων ἀνδρῶν τε καὶ γυναικῶν, καὶ πάσης ἡλικίας καὶ μέχρις αὐτῶν ἤδη τῶν κατ' οἴκους θαλαμευομένων κορῶν, ἐντοπίων τε καὶ ξένων, χριστιανῶν τε ἅμα καὶ τῶν ἀλλαχόθεν ἐπιδημούντων ἐθνικῶν· ὁμοθυμαδὸν δὲ πάντων ὡς ἐξ ἑνὸς στόματος Χριστὸν Ἰησοῦν τὸν κύριον ἡμῶν, τὸν υἱὸν τοῦ θεοῦ τὸν μονογενῆ, τὸν θαυματοποιὸν ἀνυμνούντων, ἔργῳ τε καὶ πείρᾳ παραλαβόντων· ὅτι χριστιανῶν τὸ δόγμα τὸ ανευσεβὲς οὐκ ἐν πειθοῖς σοφίας ἐστι λόγοις, ἀλλ' ἐν ἀποδείξει πνεύματος καὶ δυνάμεως, οὐχ ὑπ' ἀνθρώπων μόνον καταγγελλόμενον, ἀλλ' ἐξ οὐρανῶν θεόθεν μαρτυρούμενον.
Ἐπεὶ τοίνυν ἡμεῖς, οἱ τῆς Ἱερουσαλὴμ οἰκήτορες, τὸ τοῦ θαύματος παράδοξον αὐταῖς ὄψεσι παραλαβόντες, θεῷ μὲν τῷ παμβασιλεῖ καὶ υἱῷ τῷ μονογενεῖ τοῦ θεοῦ τὴν πρέπουσαν μετ' εὐχαριστίας προσκύνησιν ἀπεδώκαμεν τε καὶ ἀποδώσομεν, εὐχὰς ἐκτενεῖς καὶ ὑπὲρ τοῦ θεοφιλοῦς σου κράτους ἐν τοῖς ἁγίοις τόποις πεποιημένοι τε καὶ ποιησόμενοι, ἔδει δὲ τὰς ἐπουρανίους ταύτας θεοπτίας μὴ παραδοῦναι σιωπῇ, ἀλλ' εὐαγγελίσασθαι σου τὴν ἔνθεον εὐσέβειαν ἐξαυτῆς διὰ τούτων ἐσπούδασα τῶν γραμμάτων·
Dans les saints jours de la fête de la Pentecôte, les nones de mai (le 7 mai) vers la 3me heure du jour (9 heures du matin) il parut au ciel au-dessus du mont Golgotha une très grande croix composée de lumière qui s'étendait jusqu'à la sainte montagne des Oliviers. Elle eut pour témoins non pas une ou deux personnes, mais la ville toute entière. Elle n'a point été, comme on pourrait peut-être le croire, un de ces phénomènes qui paraissent et disparaissent en quelques instants. Mais cette croix a brillé sur la terre pendant plusieurs heures, constamment visible aux yeux de tout le monde, effaçant par son éclat celui même du soleil qui l’aurait d'ailleurs absorbé, si la lumière de la croix n'eût pas été supérieure à celle de l'astre du jour aux yeux des spectateurs. On vit aussitôt accourir dans l'Eglise tout le peuple de la ville, frappé d'une crainte mêlée de joie, à la vue d'un tel prodige. Les jeunes et les vieux, les hommes et les femmes, jusqu'aux filles qui vivent en retraite dans l'intérieur des maisons; les indigènes, les étrangers, les chrétiens, les gentils qui affluent ici de tous les côtés. Tous de concert, tous d'une voix unanime chantèrent aussitôt les louanges de notre Seigneur Jésus Christ, le Fils unique de Dieu, l'auteur des prodiges, convaincus par leur expérience que la vérité du christianisme ne s'appuie pas sur les moyens oratoires de la sagesse humaine, mais sur les effets sensibles de l'esprit et de la puissance de Dieu. (1 Cor 2,4) Bien moins sur la prédication qu'en font les hommes, que sur les témoignages que le ciel se plaît à lui rendre
Quant à nous, habitants de Jérusalem, qui avons été témoins oculaires de ce consolant prodige, qui en avons rendu grâces au Roi des rois, à Jésus Christ, fils unique de Dieu, comme nous le ferons encore; quant à nous qui avons dans ces saints lieux, comme nous le ferons toujours, adressé au ciel de ferventes prières pour la prospérité de votre empire qui est sous la protection de Dieu, nous avons pensé qu'il ne nous était pas permis d'enfouir dans le silence cette heureuse apparition dont Dieu nous a gratifiés; mais que nous devions nous hâter d'en donner avis à un Prince que le ciel a doué d'une haute piété.
Cyrille de Jérusalem, Lettre à l'empereur Constance, texte grec sur Epistula ad Constantium, traduction de Louis Cousin

vers 440. Le récit de Socrate de Constantinople

Socrate de Constantinople, dit aussi Socrate le scholastique, fut l'auteur d'une histoire ecclésiastique, continuant celle d'Eusèbe de Césarée. Il est donc normal qu'il cite les chiasmophanies. Ici, il nous apprend que la même année que la croix de Jérusalem, une croix fut visible à Antioche.

Τότε δὲ ὁ βασιλεὺς Γάλλον μὲν ἀνεψιὸν ἑαυτοῦ Καίσαρα καταστήσας, τό τε οἰκεῖον θεὶς αὐτῷ ὄνομα, εἰς τὴν Συρίας Ἀντιοχείαν ἔπεμψε, φρουρεῖσθαι τὰ τῆς ἑῴας μέρη δι´ αὐτοῦ προνοούμενος. Ὅτε καὶ ἐπιστάντος αὐτοῦ τῇ Ἀντιοχέων, τὸ τοῦ Σωτῆρος σημεῖον περὶ τὴν ἀνατολὴν ἐφάνη· στύλος γὰρ σταυροειδὴς ἐν τῷ οὐρανῷ ὀφθεὶς μέγιστον θαῦμα τοῖς ὁρῶσιν ἐγένετο. Dans le même tems l'Empereur Constance déclara Gallus son cousin César, et lui aïant donné son nom, l'envoia à Antioche pour y défendre les Villes d'Orient. Comme il entroit dans cette Ville ; une croix parut au ciel ; au grand étonnement des spectateurs.
Socrate le scholastique, Histoire Ecclésiastique, texte grec sur le site de Philippe Remacle, traduction de Louis Cousin

vers 450. Le récit de Sozomène

Salaminios Hermias Sozomenos fut, lui aussi, l'auteur d'une histoire ecclésiastique, continuant celle d'Eusèbe de Césarée. Il nous parle donc aussi de la croix de Jérusalem, avec quelques détails supplémentaires.

Ἐν δὲ τῷ τότε Κυρίλλου μετὰ Μάξιμον τὴν Ἱεροσολύμων ἐκκλησίαν ἐπιτροπεύοντος σταυροῦ σημεῖον ἐν τῷ οὐρανῷ ἀνεφάνη καταυγάζον λαμπρῶς, οὐχ οἷον κομήτης ταῖς ἐκλάμψεσιν ἀπορρέον, ἀλλ´ ἐν συστάσει πολλοῦ φωτὸς ἐπιεικῶς πυκνὸν καὶ διαφανές, μῆκος μὲν ὅσον ἐκ τοῦ Κρανίου μέχρι τοῦ ὄρους τῶν Ἐλαιῶν, ἀμφὶ δὲ δέκα καὶ πέντε στάδια τὸν ὑπὲρ τὸν χῶρον τοῦτον οὐρανὸν ἀπολαβόν, εὖρος δὲ τῷ μήκει ἀνάλογον. Ὡς ἐπὶ παραδόξῳ δὲ τῷ συμβεβηκότι θαύματι καὶ δέος πάντας ἔσχεν. Οἰκίας δὲ καὶ ἀγορὰς καὶ ὅπερ ἔτυχεν ἕκαστος ἐργαζόμενος καταλιπὼν ἅμα παισὶ καὶ γυναιξὶν εἰς τὴν ἐκκλησίαν συνῆλθον καὶ κοινῇ τὸν Χριστὸν ὕμνουν καὶ θεὸν προθύμως ὡμολόγουν. Οὐ μετρίως δὲ καὶ πᾶν τὸ καθ´ ἡμᾶς οἰκούμενον ἡ περὶ τούτου ἀγγελία κατέπληξεν. Ἐγένετο δὲ τοῦτο οὐκ εἰς μακράν. Ὡς γὰρ εἰώθει, ἐκ πάσης, ὡς εἰπεῖν, γῆς κατ´ εὐχὴν καὶ ἱστορίαν τῶν τῇδε τόπων Ἱεροσολύμων ἐνδημοῦντες, ὧν ἐγένοντο θεαταί, τοῖς οἰκείοις ἐμήνυσαν. Ἔγνω δὲ τοῦτο καὶ ὁ βασιλεὺς ἄλλων τε πολλῶν ἀναγγειλάντων καὶ Κυρίλλου τοῦ ἐπισκόπου γράψαντος. Ἐλέγετο δὲ παρὰ τῶν τὰ τοιάδε ἐπιστημόνων κατά τινα προφητείαν θείαν πάλαι ταῦτα προμεμηνῦσθαι ἐν ταῖς ἱεραῖς βίβλοις. Καὶ τὸ μὲν ὧδε συμβὰν πολλοὺς Ἑλλήνων καὶ Ἰουδαίων εἰς Χριστιανισμὸν ἐπηγάγετο. Dans le temps que Cyrille avait succédé à Maxime au gouvernement de l'Eglise de Jérusalem, il parut au Ciel une Croix dont la lumière était ramassée et vive, au lieu que celle des Comètes est ordinairement dissipée, et languissante. Sa longueur était environ de quinze stades, depuis le Calvaire, jusques à la montagne des Oliviers, et sa largeur à proportion. Un prodige si extraordinaire, et si nouveau remplit tous les esprits d'admiration, et de frayeur ; de sorte qu'il n'y eut personne de quelque âge, ou de quelque condition qu'il fût, qui ne courût à l'Eglise pour y faire ses prières. La nouvelle en fut bientôt répandue dans toutes les Provinces par les étrangers qui en avaient été témoins. L'Empereur en fut lui-même informé, tant par une lettre de Cyrille, que par les relations de quelques autres personnes. On dit que ce prodige avait été prédit par une prophétie contenue dans la sainte Ecriture. Il servit à la conversion d'un grand nombre de Juifs, et de Païens.
Sozomene, Histoire Ecclésiastique, texte grec sur le site de Philippe Remacle, traduction de Louis Cousin

vers 640. La Chronique d'Alexandrie mentionne la croix

La Chronicon Paschale, aussi appelée Chronicon Alexandrinum, est une chronique byzantine de l'histoire du monde rédigée du temps de l'empereur Héraclius. Elle compte depuis l'origine du monde, et place l'observation de la croix en l'an 5859. Nous n'en avons, disponible en ligne, que la traduction en latin.

Τὸ σημεῖον τοῦ σταυροῦ τοῦ Χριστοῦ ὥφϑη ἐν Ἱεροσολύμοις κατὰ τοῦτον τὸν χρόνον, ὥρα ἦν ὡς τρέτη, ἐν ἡμέρᾳ πεντηκοστῇ, φωτοειδὲς τεταμένον νώναις μαΐαις ἐν τῷ οὐρανῷ ἀπὸ τοῦ ὄρους τῶν ἐλαιῶν ἕως τοῦ Γολγοϑᾶ, ἐν ᾧ τόπῳ ἐσταυρώϑη ὃ κύριος κατὰ ἀνατολάς, ὅϑεν ἀνελήφϑη ὃ κύριος, κύκλῳ τοῦ φανέντος τιμίου σταυροῦ, στέφανος ὡς ἢ ἶρις τὸ εἶδος ἔχων. καὶ τῇ αὑτῇ ὥρᾳ ὥφϑη ἐν Παννωνίᾳ Κωνσταντίῳ τῷ Ἀὐγούστῳ καὶ τῷ σὺν αὐτῷ στρατῷ ὄντι ἐν τῷ κατὰ Παγνέντιον πολέμῳ, καὶ ἀρξαμένου Κωνσταντίου νικᾶν, Παγνεντίου συμβαλόντος αὐτῷ πεοἱ τὴν λεγομένην Ποῦρσαν πόλεν, ἡττηϑεὶς ὃ αγνέντεος ἔφυγεν εἷς τὴν Γαλλίαν μετ᾽ ὀλίγων.. Signum Crucis Christi eadem tempestate Hierosolymis in coelo apparuit, sub horam tertiam, Nonis Maii, ipso Pentecostes die, luminis instar protensum a Monte Olivarum usque ad Golgotha, quo loco versus Orientem Christus est Crucifixus, unde assumptus est Dominus: corona caeterum iridis speciem praeferente venerandam istam crucem ambiente. Eademque hora Constantio Augusto in Pannonia, et qui cum eo erat exercitui, visa est in bello contra Magnentium : cumque coepisset, Constantius cum illo confligere ad urbem Mursam, Magnentius victus cum paucis in Galliam fuga evasit. Le signe de la Croix du Christ apparut dans le même temps à Jérusalem dans le ciel, vers trois heures, le 9 mai, le jour même de la Pentecôte, comme une lumière s'étendant du Mont des Oliviers au Golgotha, dans lequel lieu vers l'Orient le Christ fut crucifié, d'où le Seigneur fut élevé : une couronne présentant l'apparence de l'arc-en-ciel entourant cette vénérable croix. Et à la même heure Constance Auguste en Pannonie, et ceux qui étaient avec lui dans l'armée, fut vu en guerre contre Magnence : lorsque Constance commença à combattre avec lui près de Mursa, Magnence fut vaincu et s'enfuit avec quelques uns en Gaule.
Corpus scriptorum historiae byzantinae, Chronicon Paschale, Bonn, 1832, p 540

IXe siècle. Photius résume le récit de Philostorge

Philostorge, fut aussi un historien ecclésiastique, mais son Histoire en douze livres, couvrant la période 324-425, est la seule a donner le point de vue arien. Nous n'en avons plus que des fragments, ou le résumé par Photius. Nous ne sommes pas sûr de l'exactitude du texte grec, copié sur la patrologia graeca de l'abbé Migne.

Ὁ μὲν οὖν Κωνστάντιος ἐγχρατὴς τοῦ τυράννου γίνεται, χἀνταῦθα τοῦ σημείου τοῦ σταυροῦ ἐ πὶ μέγιστόν τε προφανέντος, καὶ χαταπληχτιχωτάταις αἴγλαις ὑπεραστράψαντος τὸ τῆς ἡμέρας φῶς. Ὥφθη δὲ ἐπὶ τῶν Ἰεροσολύμων περὶ τὴν τρίτην ὥραν μάλιστα τῇς ἡμέρας, ἑορτῆς τῆς λεγομένης Πεντηχοστῆς ἐνισταμένης. Ὁ δὲ θεόγραφος τύπος ἐχεῖνος ἀπὸ τοῦ λεγομένου Ἐρανίου μέχρι χαὶ τοῦ τῶν Ἐλαιῶν ἔρους διήχων ὡρᾶτο, ἴριδος μεγάλης στεφάνου τρόπὸν πανταχόθεν αὐτὸν περιελιττούσης. Ἐδήλου δὲ ἄρα ἣ μὲν ἔρις τὴν τοῦ σταυρωθέντος καὶ ἀναληφθέντος εὐμένειαν " ὁ δὲ στέφανος τὴν τοῦ βασιλέως νίκην, Τὸ δὲ σελασφόρον ἐκεῖνο χαὶ σεδάσμιον θέαμα οὐδὲ τοῖς ἐπὶ τοῦ στρατοπέδου ἀθέατον ἦν, ἀλλ᾽ ἐπιδέλως ὁρώμενον, Μαγνέντιον μὲν καὶ τοὺς σὺν αὐτῷ ἔτε τῇ τῶν δαιμόνων θεραπείᾳ προσαναχειμένους, εἰς ἀμέχανον δέος χατέστησε" Κωνστάντιον δὲ καὶ τοὺς περὶ αὐτὸν εἰς θάρσος ἄμαχον ἀνεχτήσατο. Constance remporta une victoire sur le tyran : à cette occasion aussi, le signe de la croix lui apparut : son aspect était d'une taille immense, et dans l'éclat de ses rayons il dépassait merveilleusement même l'éclat du jour. Il apparut à Jérusalem vers la troisième heure du jour qu'on appelle le jour de la Pentecôte. Ce signe, qui n'était représenté par aucune main humaine, s'étendait depuis le mont du Calvaire jusqu'au mont des Oliviers, et était accompagné d'un grand arc-en-ciel comme une couronne, qui l'entourait de tous côtés. L'arc-en-ciel, en effet, signifiait la miséricorde de Jésus-Christ crucifié et élevé au ciel, et la couronne signifiait la victoire de l'empereur. D’ailleurs, ce signe splendide et vénérable n’échappait pas même aux soldats. Mais, bien que les deux armées l'aient bien vu, elle effrayait surtout Magnence et ses partisans, adonnés à des pratiques superstitieuses ; tandis que, d'un autre côté, cela inspirait à Constance et à son armée une bravoure invincible.
Note: On remarque l'incohérence géographique: les deux armées ne pouvaient pas interpréter un prodige qu'on ne voyait qu'à Jérusalem.
J-P. Migne, Patrologiae graecae tomus LXV, Paris, 1864, col 511-514

1783 l'abbé Godescard défend Cyrille

l'abbé Jean-François Godescard, chanoinne de St Honoré de Paris, et membre de l'académie des sciences et arts de Rouen, traduisit de nombreux ouvrages, en particulier The lives of the fathers, martyrs, and other principal saints, publie par Alban Butler en 1756. Il ne peut donc qu'adopter le point de vue de l'auteur initial

Le,commencement de fon Episcopat est célebre dans l’Histoire , par un miracle que Dieu opéra pour honorer l'instrument de notre salut. Comme le fait est intéressant et appuyé sur des autorités inconteslables, nous allons le rapporter ici (a). Saint Cyrille, qui en avoit été témoin oculaire, écrivit aussitôt à l'Empereur Constance pour lui en faire part. Voici ses propres paroles :
Note: ici, le texte de Cyrille, vu plus haut. Mais cyrille n'affirme clairement pas en avoir été témoin oculaire. Ses erreurs montrent qu'il n'en fut rien.
(a) Ce fait est rapporté par Socrate, L 2. c. 28. par Philostorge , L. 3. c. 26. par l'Auteur de la Chronique d'Alexandrie, etc. Quant à la lettre de saint Cyrlle, on ne peut douter qu'elle ne soit authentique. Elle est citée, comme étant de ce Pere, par Sozomene, L.5. c. 5. par Théophane, sous l'an 353. par Eutychius, Annal. p. 475. par Jean de Nicée, Auctuar, Combesis, T. 2. p. 382. par Glycas, etc. Cave l'a insérée à la fin de la Vie de saint Cyrille, T. 2. P. 344. Mais plus cette lettre paroît authentique, plus elle déplaît par cela même à Rivet et aux autres ennemis de la Croix de Jesus - Christ, Ils la tiennent pour suspecte, non pas en effet qu'il y ait des marques de fausseté, mais parce qu'ils ont intérêt d'y en trouver. Blondel l'allegue comme vraie, sans oser en contester la vérité.
Abbé Godescard, Vie des pères, des martyrs, et des autres principaux saints, nouvelle édition, Paris, Barbou, 1783, p. 36

1826 l'abbé Vrindts interprète outrageusement.

Sectaire, royaliste, procédurier et ultramontin en diable (si l'on peut dire) l'abbé Vrindts avait l'âme d'un pamphlétaire. L'abbé de La Mennais en a su quelque chose. Bien qu'il n'ait publié que quelques ouvrages, son sectarisme éclate en particulier dans La croix de Migné vengée de l'incrédulité, où il cherche des apparitions de croix similaires à celle de Migné.

S. Cyrille fut élevé sur le siége de Jérusalem l'an 350 de Jésus-Christ, et Dieu signala le commencement de son épiscopat l’an 351 par un prodige qu'il raconte lui même ainsi dans une lettre à l'empereur Constanee , écrite la quatorzième année du règne de ce prince :
Note: ici, le texte de Cyrille, vu plus haut.
L’authenticité de cette lettre est reconnue formellement par Glicas, Jean de Nicée , Théophane, Eutychius , Sozomène et autres , et le fait lui-même est rapporté entre autres par Philostorge, Socrate et la chronique d’Alexandrie. Philostorge, arien et ennemi de S. Athanase , en parle ainsi dans son abrégé de l’Histoire Ecclésiastique :
Note: ici, le texte de Philostorge, vu plus haut, mais d'après sa traduction en latin.
  Voici la traduction de ce fait dans la Chronique d'Alexandrie:
CHRONIQUE D'ALEXANDRIE POUR L’AN 351,.L’AN 5859, LA 14° ANNÉE DE L'EMPEREUR CONSTANCE, INDICT. 9°, SOUS LE CONSULAT DE SERGIUS ET DE NiGRANUS.
En ce méme temps (c’est à dire après que Gallus, l’oncle paternel de Constance, eut été proclamé césar et associé à l’empire les ides de mars) le signe de la croix parut dans le ciel à Jerusalem, environ à la troisième heure, les nones de mai, le jour méme de la Pentecôte, sous une forme lumineuse, s'étendant depuis la montagne des Olives jusqu'au Golgotha, qui est le lieu où Jésus-Christ a été mis en croix, du côté de l'orient, où le Seigneur est monté au ciel. Cette croix précieuse fut environneée d’une couronne en forme d'arc-en-ciel, et elle fut aperçue à la méme heure dans la Pannonie par Constance Auguste et par son armée durant la guerre contre Magnence. Constance en étant venu aux mains avec lui près la ville de Murse, Magnence fut défait, et il s'échappa par la fuite avec un petit nombre des siens dans les Gaules.
Note: C'est une mauvaise traduction de la traduction latine de la Chronique d'Alexandrie, vue plus haut. Elle ne dit pas du tout que la Croix fut vue à la même heure en Pannonie.
Nous ne pouvons cependant nous dispenser de faire ici une observation frappante. Persécuteur hérétique, Constance fit plus de mal à la vraie religion que les persécuteurs idolâtres : Magnence , qu'il vainquit , était païen et tyran cruel; l’armée de Constance était presque toute composée de soldats catholiques. Constance et son armée voient la croix lumineuse , mais de loin, et son armée remporte une victoire signalée sur l’armée idolâtre. La croix apparaît à Jérusalem, cité d’où l’arianisme est banni, et qui est le siége d’un saint pontife de l’Eglise catholique. Le peuple fidèle ressent les fruits du prodige, et les païens reconnaissent la divinité de Jésus-Christ. Constance n’aperçoit la croix que de loin, éloigné lui-même de la vérité par l’arianisme ; mais son armée triomphe parce que le soldat combat l’idolàtrie, et ne partage point l’hérésie de l'empereur.
Note: Cette interprétation outrancière n'est qu'une rèverie sectaire: Constance n'a rien vu, et les ariens sont eux aussi des chrétiens.
Constantin vit la croix élevée au-dessus de l'astre du jour, et la contempla de près avec une inscription, qui lui prédit la victoire. Constance la voit de loin et humiliée, puisqu’elle s’étend horizontalement du Calvaire au mont des Oliviers : elle ne lui promet rien; elle lui est étrangère , parce que lui-même est étranger à Jésus-Christ, à qui il conteste sa divinité avec les sectateurs de l’impie Arius. Le contraste est frappant , et il pouvait l’être pour Constance même s’il avait su se rendre attentif aux lumières de la grâce qu’il repoussait par ses crimes. La croix de Jérusalem est couchée; c’est un état d’humiliation convenable à celui de l'Eglise opprimée par l’arianisme , et propre à annoncer les malheurs que Julien allait faire fondre sur elle.
Note: De pire nen pire: Constantin n'a jamais vu ce qu'on croit qu'il a vu, Constance non plus, et il ne risquait pas de voir la croix de Jérusalem depuis la Pannonie (à plus de 2000 km de là). La croix de Jérusalem n'était pas couchée, et Arius n'était pas un impie. L'interprétation de l'abbé Vrindts est digne de celle d'un astrologue.
abbé Vrindts, La croix de Migné vengée de l'incrédulité, Paris, 1829, p. 173-174

1843 l'abbé Rohrbacher copie Cyrille

l'abbé René François Rohrbacher, historien ecclésiastique, enseigna la Théologie avec La Mennais, puis devint professeur d'histoire de l'Église au séminaire de Nancy. Son oeuvre peincipale est Histoire universelle de l'Église catholique en 14 volumes. On sent qu'il est d'accord avec Cyrille qui texte d'extirper Constance de son hérésie arianiste.

Dans les cinquante jours de la Päque à la Pentecôte, le 7 mai 351, à neuf heures du matin, une immense croix de lumière parut au-dessus du Golgotha, s'étendant jusqu'à la montagne des Olives; elle se montra très-distinciement, non à une ou deux personnes, mais à tout le peuple de la ville. Ce ne fut point, comme on pourrait le penser, un phénomène passager : il subsista au-dessus de la terre pendant plusieurs heures, visible aux yeux et plus éclatant que le soleil, dont la lumière l'aurait effacé, si la sienne n'avait été plus forte. Aussitôt tout le peuple accourut à l'église avec une crainte mêlée de joie : les jeunes et les vieux , les hommes et les femmes, et jusqu'aux filles les plus retirées ; les chrétiens du pays et les étrangers, et les païens qui y étaient venus de divers lieux. Tous, d’une voix, louaient notre Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, le faiseur de miracles, voyant par expérience la vérité de la doctrine chrétienne, à qui le ciel rendait témoignage. Dans cette lettre, que nous avons encore, saint Cyrille donne à Constance les épithètes les plus honorables : c'était sans doute pour l'affectionner davantage à la vraie foi ; car il finit par lui souhaiter de glorifier à jamais la sainte ct consubstantielle Trinité. L'église grecque célèbre au 7 mai la fête de ce miracle, qui d’ailleurs est attesté par un grand nombre d'autres historiens.
Note: le phénomène est attesté par plusieurs historiens, mais le supposé miracle n'est attesté que par des historiens ecclésiastiques qui se recopient les uns les autres.
Abbé Rophrbacher, Histoire universelle de l'élise catholique, tome 6, J-G Lardinois, Liège, 1844, p. 346

1895 Arthur Loth tente de prouver la vérité du christianisme.

Arthur Loth, archiviste paléographe, mais aussi écrivain catholique, qui fut rédacteur en chef de l'univers, consacra une partie de sa vie à l'historicité de Jésus. Il fit aussi l'apologie des miracles, et publia en particulier Le miracle en France au XIXe siècle, qui commençait par exposer le "miracle" de la croix de Migné. C'est à ce popos qu'il cite des miracles similaires.

La première grande manifestation de ce genre est celle qui eut lieu sous Constantin, et dent le résultat fut la conversion de l'empire romain, de cet empire qui était alors tout le monde civilisé. La seconde arriva au jour de la Pentecôte, à Jérusalem, sous l'épiscopat du grand patriarche saint Cyrille. La croix se montra depuis le sommet du Calvaire jusqu'au mont des Oliviers, embrassant tout l'horizon de la scène divine de la Passion, et attestant dans la sainte cité, aux yeux du monde païen converti, la vérité du christianisme.
Note: La vision de Constantin n'a jamais eu lieu, la croix de Jérusalem n'était qu'une croix parhélique, et lui faire attester la vérité du christianisme est aussi absurde que de prouver l'existence de Dieu par celle de l'arc-en-ciel.
Arthur Loth, Le miracle en France au XIXe siècle., Desclée de Brouwer, 1895, p. 126-127

Analyse

Les renseignements les plus précis semblent donnés par la lettre de Cyrille à Constance, mais nous allons voir qu'ils ne sont pas cohérents.
Cyrille nous affirme que le phénomène s'étendait du golgotha au mont des oliviers. Malheureusement le mont des oliviers est de l'autre coté de la ville, distant du Golgotha d'environ 1.5 km. Par ailleurs il nous assure que la croix était plus brillante que le soleil, ce qui ne tient pas debout. D'abord, même si c'était un miracle divin, il est bien probable que Dieu se serait servi de la lumière du soleil, auquel la croix aurait emprunté une partie de sa lumière. Ensuite, si la croix avait été plus brillante que le soleil, les témoins n'auraient pas pu supporter son éclat. Non, une croix visible d'un horizon à l'autre, et plus brillante que le soleil, c'est absurde.
Devant ces incohérences, on peut soupçonner que Cyrille ne fut pas lui même témoin du phénomène, et qu'il ait brodé son récit "ad majorem Dei gloriam", en allégant une luminosité digne d'un prodige divin.

Sozomène, du moins dans la traduction qu'en donne Cousin, ajoute que la croix faisait 15 stades (entre 2.5 et 3 km). Mais Sozomène ne fut pas lui même témoin, et ces 15 stades sont hautement suspects. Déjà, cela fait plus que le distance du golgotha au mont des oliviers. Surtout, les témoins donnent habituellement des dimensiosn à l'échelle humaine, correspondant à un phénomène qui serait situé à une trentaine de pas. On parlerait alors de 15 pieds ou 15 coudées, mais pas de 15 stades. On peut soupçonner une erreur de transcription ou de traduction.

Ce sont Philostorge, bien que résumé par Photius, et la chronique d'Alexandrie qui nous donnent les renseignements les plus utiles en disant que la croix était entourée d'un arc-en-ciel. D'un arc-en-ciel, donc d'un cercle, et cela nous apprend que les branches de la croix étaient égales. Ceci s'accorderait parfaitement avec un phénomène parhélique.
Le 7 mai, à Jérusalem, vers la troisième heure, le soleil était à l'est, assez haut dans le ciel. On peut admettre qu'une croix parhélique ait pu se former et soit restée visible assez longtemps pour être observée par une bonne partie des habitants. Il est remarquable que, depuis le mont des oliviers, le soleil, et donc la croix, paraissait justement dans la direction du Golgotha. Dès lors le texte de Cyrille se comprend mieux. Ce n'est pas la croix qui s'étendait jusqu'au mont des oliviers, mais les témoins.
Par ailleurs, on peut admettre qu'un phénomène similaire ait été visible à Antioche, mais on ignore si c'était le même jour.

Conclusion

Le croix apparue à Jérusalem le 7 mai 351 n'était qu'une croix parhélique, mais qui, semblant au dessus du Golgotha, fut interprétée par les chrétiens commme un miracle. Pourtant, c'était une croix grecque, et non une croix de supplice (en forme de T) ou une croix latine. De plus, il manquait les deux autres croix (celles des larrons) pour faire une représentation vraisemblable de la crucifixion. Mais la plupart des auteurs qui en ont parlé ensuite, ne l'ont pas vu autrement que comme un miracle, et en ont défendu l'authenticité, sans se préoccuper des incohérences. Le sectarisme de l'abbé Vrindts est écoeurant et son interprétation d'une croix couchée à Jérusalem et visible jusqu'en Pannonie (à plus de 2000 km de distance) est tout simplement grotesque.

Dernière mise à jour: 05/09/2024

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