Essaim de Corpuscules passant devant le Soleil. - Le 7 mai, par un ciel très pur (chaleur accablante), avec un léger courant d'air N.-O. dans les couches supérieures de l'atmosphère, j'ai vu passer devant le Soleil (vers 1h 10min) et sans discontinuer pendant les 10 à 15 minutes que je l'observai par projection, de nombreux Corpuscules couleur grise, de forme rondes dont ,très peu de nets, et ceux-là seuls, ayant une couleur noire bien définie.
  Ils suivaient tous une direction du N .-O. au S.-O. sans être absolument parallèles entre eux. Tous passaient avec la même rapidité
  Ces corpuscules devaient s'étendre sur une aire supérieure au disque solaire, car j'en ai observé de part et d'autre du Soleil, qui apparaissaient sous l'aspect de petits globes lumineux en passant à proximité de l'astre.
   Sur le Soleil, ils passaient toujours plusieurs à la fois, 3, 4; et se succédaient avec une grande rapidité. J'en ai compté une trentaine dans l'espace de quelques secondes. A l'observation directe, je n'ai rien pu distinguer. Ces corps devaient être trop petits pour la puissance de la petite lunette.
  Le 24 de ce mois, j'ai observé deux de ces corpuscules. L'un est passé sur le Soleil; l'autre à côté, en devenant toujours lumineux sur un certain parcours   Les trajectoires suivies étaient voisines du N.-O au S.-O,
  J'attire de nouveau l'attention sur ces corpuscules. Leur vitesse constante indique qu'ils voyagent tous pour une même cause et dans un même milieu.

MAURICE JACQUOT,
au Hâvre.

  Autre passage de corpuscules devant le Soleil le 30 août 1886.- Obsevations par projections et Observations directes.
  Commencement des observations du Soleil à 1 h 10m, fin des observations du Soleil 1h50m.
  1. Observations par projections, - Jumelle marine 57mm d'objectif.
     A Première observation de 1h10m à 1h17m, j'ai compté 25 corpuscules en 7min,
     B Deuxième observation de 1h44m à 1b 49m, j'ai compté 17 corpuscules en 5min.
  Soit 42 corpuscules en 12min.
  Ce qui nous donne une moyenne de 3.5 corpuscules par minute.
  2. Observations directes.- Lunette de 68mm, oculaire terrestre.
     C l'remière observation de 1h20m à 1h26m, j'ai compté 23 corpuscules en 6min.
     D Deuxième observation de 1h30m à 1h34m, j'ai compté 17 corpuscules en 4min.
  Soit 40 corpuscules en 10min.
   Ce qui nous donne une moyenne de 4 corpuscules par minute.
   Observations par projections et directes, j'ai donc compté 82 corpuscules en 22min, et la moyenne générale devient 3, 727 corpuscules par minute.
   La moyenne du thermomètre était dans le milieu du jour 27°, chaleur accblante. Pas de vent.
   Le Baromètre était à 761mm.
   Angle de 200 à 300 avec la ligne des Pôles:
  1° Direction des corps, du Sud-Sud-Ouest au Nord-Nord-Est, et du Sud-Sud- Est au Nord-Nord-Ouest;
  2° Le plus grand nombre des corpuscules était visible sur l'hémisphère occidental; (ils allaient du Sud-Sud-Ouest au Nord-Nord-Est);
  3° Les corpuscules passaient sur une étendue en largeur, supérieure à celle du. Soleil;
  4° Tous avaient la meme vitesse et suivaient des chemins absolument droits;
  5° Les trajectoires de ces corps étaient en général parallèles entre elles, pour tous ceux qui avaient la même direction;
  6° Les quelques corps allant du Sud-Sud.Est au Nord-Nord-Ouest faisaient avec les précédents un angle d'environ 40° à 50°;
  7° La grosseur de ces corps était variable, mais sur l'écran, ils étaient tous confus, bien que l'image solaire fut bien au point;
  8° Avec un grossissement de 150 fois environ, avec une lunette de 68mm, je n'ai rien vu de précis. Il n'y avait pas assez de lumière;
  9° Les corpuscules cessaient d'être lumineuses à une distance du Soleil, équivalente à celle de leur appari'tion.
    A l'Observation par projections, on pouvait parfaitement suivre tout le chemin parcouru par ces petits corps, car, avant de passer sur le Soleil (sur lequel ils produisaient une petite tache grise ronde) de même qu'à leur sortie, ils étaient
  lumineux.
    Au contraire, à l'Observation directe (à moins que le corps fut très gros, et alors il était visible à son passage sur le Soleil, comme une petite boule confuse), les corpuscules n'étaient visibles qu'avant et après leur sortie sur le disque.
    Quand ils passaient à droite ou à gauche (et c'est là qu'on les observait le mieux), ils étaient visibles, lumineux, sur tout leur parcours. L'aspect confus qu'avaient les gros corps visibles directement sur le Soleil, et la disparition des petits à leur passage sur l'astre, indiquent bien que la lunette n'était pas au point pour eux.
  Je ferai remarquer que, pour m'édifier sur la valeur de mes notes, j'ai fait quatre observations séparées de deux modes différents, et, en les relevant, je me suis aperçu avec plaisir que les résultats concordaient parfaitement entre eux.
  Malheureusement mes occupations m'ont forcé à abandonner le Soleil à 1h50m, ce qui m'a empêché d'observer le phénomène en entier.
  J'ai assisté au plus gracieux feu d'artifice qu'on puisse imaginer.
  Ces jolies petites boules brillantes, apparaissant subitement sur le fond d'azur des cieux, et passant à côté du Soleil, ou disparaissant à leur passage sur le disque lumineux pour reparaître ensuite, ou encore visibles sur tout leur parcours sous différents aspects, donnaient au tableau quelque chose de féerique et de vivant.
  Voilà trois années de suite que j'observe un semblable passage de corpuscules plus ou moins important au mois d'août.
  En 1883, M. Bruguière, à Marseille, et Brouilla, au Mexique, ont fait une semblable observation.
   Il est vrai que le même phénomène s'est produit dans d'autres mois, mais jamais avec tant d'intensité; aussi n'y aurait-il pas témérité à demander si ces corps peuvent appartenir à une zone concentrique de bolides de différentes grosseurs circulant entre nous et le Soleil, le long d'une zone analogue à celle des petites planètes entre Mars et Jupiter.

MAURICE JACQUOT,
Observateur, au Hàvre.

  Remarque. - L'examen attentif des circonstances de cette curieuse observation conduit à penser qu'il s'agit là, non de corpuscules cosmiques, bolides ou uranolithes, mais bien plutôt de passages d'oiseaux. Le 8 août dernier, M. Léotard a fait à Marseille une observation analogue qui conduit à la même conclusion. La voici:

  Même sujet. - Le 8 août 1886, de 5h30m à 5h50m matin. Le soleil apparaît au dessous de l'horizon. Je l'observe avec la lunette de 108mm (grossissement: 100 fois) lorsque je remarque quelques points noirs traversant le disque.
  Peu après, j'en observe quelques autres encore, soit isolés, soit groupés. Ils traversent le disque en des temps variables, de 2', 3' environ, selon, probablement, leurs distances respectives à moi. .
  J'ai vu aussi une vingtaine de ces points noirs et n'hésite pas à les attribuer à des oiseaux. En effet, sur plusieurs, j'ai remarqué deux appendices latéraux représentant, dans ce. cas, les ailes; le Soleil, par sa position à l'horizon, devait, en effet, multiplier ces passages dans l'épaisse couche atmosphérique que je pouvais ainsi observer.

JACQUES LÉOTARD.
Observatoire do la Société scientifique Flammarion de Marseille