La polémique à propos de la Vision de Constantin

La vision de Constantin étant un des piliers du catholicisme, il fallut attendre la réforme poour qu'elle se voit contestée. Ensuite, de même qi'il y eut une contre-réforme, il y eut contre-attaque catholique pour tenter de sauver la vision.

Les débuts de la polémique.

En 1560, Les auteurs protestants des Centuries de Magdebourg s'étaient contentés de ne dire que quelques mots de la vision de Constantin, sans la faire figurer dans l'index final.

Haec indesinenter oranti ostentum trophaei crucis e luce constructi, in coelo declinante die cum sibi, tum exercitui suo apparet, additam habens scripturam hanc, IN HOC VINCE.
Quarta Centuria Ecclesiasticae Historiae, Bale, 1560, col 29

En 1643, Jacques Godefroy publie une edition de l'histoire ecclésiastique de Philostorge avec traduction en latin. Comme Philostorge dit quelques mots de la vision de Constantin, Godefroy y ajoute une dissertation de quatre pages, ou il remarque les divergences des différents auteurs, sans mettre la vision en doute
D'autres commentateurs, comme les protestants Jacques Oisel et Jacques Tollius ont aussi eu une opinion négative, mais Jacques Oisel est aujourd'hui bien oublié et l'opinion de Tollius se cache dans quelques notes en latin, d'une édition de Lactance, notes qui auraient tout de même essuyé plusieurs critiques.

1643 Jean Hoornbeeck expose ses raisons de douter.

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Johannes Hoornbeeck ou Jean Hoornbeeck, théologien protestant, surtout connu comme polémiste, va exposer quelques raisons de douter de la vision diurne de Consrantin. Il va même donner des arguments originaux, en étudiant comment Dieu s'y prend quand il veut communiquer avec les hommes. Selon Hoornbeeck, il envoie des prophètes, ou des anges, mais ne produit jamais un grand spectacle céleste, visible par tout le monde, surtout en forme de croix.

1681, le père du Molinet, ne pardonne pas aux "centuriateurs" de douter:

Eusèbe nous assure qu'il en a appris l'histoire de la propre bouche de Constantin. S. Artémius qui avoit porté les armes sous cet Empereur en sa jeunesse, se souvenoit encore très-bien sur le déclin de son age, de cette apparition, dont il avoit esté Spectateur avec toute l'armée. Et Lactance précepteur de Constantin en fait mention en son traité de la mort des persécuteurs de chrétiens... Ces trois témoins qui parlent de ce qu'ils ont veu et de ce qu'ils ont entendu ne sont ils pas plus croyables que les centuriateurs de Magdebourg qui conteste ce miracle si authentique...
Dissertation historique sur la vision que Constantin eut de la croix de N.S., Journal des scavans, 14/04/1681, p. 121
Note: nous venons de voir que les centuriateurs ne le contestent pas.

Au XVIIIe siècle, le doute s'installe.

Avant la réforme, tous les hommes d'église s'accordaient à croire sans réserves à la vision de Constantin. Après la réforme, les protestants se sentent beaucoup moins obligés d'accorder du crédit à une histoire à laquelle les catholiques croient aveuglément. Au XVIIe siècle, ils l'admettront sans la défendre, ou en douteront sans la nier. Au XVIIIe siècle, ce sera pire: ils l'attaqueront, et les philosophes prendront le relais.

1700 Christian Thomasius flétrit une fable impudente.

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Christian Thomasius, juriste et philosophe réputé, ouvrit la voie à de grandes réformes en philosophie, droit, littérature et théologie. Audacieux précurseur, il écrivit en allemand plutôt qu'en latin, et défendit la liberté d'expression. Il ridiculisait le pédantisme, et les préjugés traditionnels, en théologie et en philosophie du droit. C'est ainsi qu'on lui doit des Observationum Selectarum Ad Rem Litterariam Spectantium, où il ne se gène pas pour flétrir la vision de Constantin.

1706 Samuel Basnage de Flottemanville a de grands doutes.

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Samuel Basnage, sieur de Flottemanville, né en 1638 à Bayeux, fils d'un ministre du culte protestant, le devint lui aussi, avant de devoir s'exiler aux Pays bas, suite à la révocation de l'édit de Nantes. Il publia à Rotterdam ses Annales politico-ecclesiastici, où il émet de sérieux doutes sur la réalité de la vision diurne de Constantin, et remarque aussi que les différents auteurs ne s'accordent pas sur la forme du labarum.

1723 Jacques Abbadie défend maladroitement la vision.

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Jacques Abbadie, brillant prédicateur et théologien protestant d'origine française, écrivit surtout en dehors de la France. Prédicateur à Berlin, pasteur à Londres, doyen de Killaloe (en Irlande), auteur d'ouvrages réputés, on pourrait croire que, comme ses confrères protestants, il descende en flammes la vision de Constantin. Hé bien non, il la défend. Mais il la défend si maladroitement qu'on pourrait croire qu'il l'attaque.

1753 Johann Lorenz von Mosheim ne croit qu'à la vision nocturne.

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Johann Lorenz von Mosheim, que l'abbé Duvoisin appelle Moshem, historien de la religion, commença par publier quelques livres polémiques, en particulier contre John Toland. En 1753, il publie De rebus christianorum ante Constantinum commentarii, ce qui lui donne l'occasion de discuter de la vision de Constantin. Après avoir étudie les différentes opinion, il ne concède que le rève nocturne dans sa conclusion.

1756 J.-G. de Chauffepié descend en flammes les preuves de la vision.

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Après que Pierre Bayle ait publié en 1697 son Dictionnaire historique et critique, le pasteur Jacques-Georges de Chauffepié entreprit de le compléter, et publia en 1750 le Nouveau dictionnaire historique et critique pour servir de complément ou de continuation, au Dictionnaire historique et critique de M. Pierre Bayle. Il se basait sur la traduction d'une édition anglaise, avec des articles complétés, et de nouveaux articles. Il consacre 6 pages à émettre des doutes sur l'histoire de cette vision, mais ces doutes sont cachés dans une digression insérée dans un autre article, consacré à Quien de la Neuville, auteur d'une histoire du Portugal. Il n'y a rien dans les tables aux mots Constantin, vision ou croix. Ses arguments furent néanmoins repris par le chevalier de Jaucourt dans le tome XVII de l'Encyclopédie cité plus loin.

1756 Voltaire dénie la compétence de l'historien Eusèbe.

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En 1756, après quinze ans de recherches, Voltaire publie à Genève son Essai sur l’histoire générale et sur les mœurs et l’esprit des nations depuis Charlemagne jusqu’à nos jours. Il y développe une vision de l’histoire, tout à fait novatrice pour son époque, et en rupture avec celle de ses prédécesseurs. Il ne s'agit plus d'aligner des litanies de noms de prince et de batailles, mais de comprendre l'histoire des peuples à travers leurs poeurs et leur mentalité. Ceci lui vaut d'être critique envers les historiens du passé, surtout s'ils sont religieux.

1765 Les objections de Chauffepié reprises dans l'Encyclopédie

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L'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert ayant commence à paraitre en 1751 (avec beaucoup de difficultés), les encyclopédistes n'hésitait pas à y tirer à vue sur tout ce qui ressemblait à des superstitions. Jacques-Georges de Chauffepié ayant balancé dans son dictionnaire une bordée d'arguments contre la vision de Constantin, l'érudit chevalier Louis de Jaucourt, le troisième homme de l'encyclopédie, les récupéra dans le tome XVII de l'Encyclopédie à l'article Vision Celeste de Constantin.

1774 Jean-Baptiste Duvoisin tente de sauver la vision

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L'abbé Jean-Baptiste Duvoisin, brillant théologien, à en croire ses supérieurs, et futur évêque de Nantes, écrivit plusieurs ouvrages qui avaient surtout pour but de défendre la religion contre les vilains philosophes du temps : C'est dans cet esprit qu'il entreprit de tenter de sauver la vision de Constantin des griffes du pasteur Chauffepié en écrivant une Dissertation critique sur la vision de Constantin. Ce livre a tout de même l'avantage de citer les travaux déja publiés sur la question.

1784 L'édition posthume du Dictionnaire philosophique suggère une fraude

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C'est vers 1750, à la cour de Frédéric II, qu'aurait germé l'idée d'un dictionnaire philosophique, mais c'est seulement en 1763, que Voltaire publie un dictionnaire philosophique portatif, de 73 articles. Dès sa parution, c'est un scandale, et le livre est condamné à être brulé, à Genève, en Hollande, à Berne, à Paris, et est mis à l'index à Rome. Il connait pourtant plusieurs rééditions, et en vient à compter 118 articles pour l'édition de 1769. C'est dans l'édition de 1784, posthume, mais surfaite qu'apparait l'article Vision de Constantin.

1829 L'abbé Vrints récite son catéchisme pour sauver la vision.

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L'abbé Vrindts, de l'église catholique Romaine, fit un livre entier consacré à défendre l'apparition de la croix de Migné, ou il ferrailla avec l'abbé de La Neufville, de la "petite église", qui la niait. L'apparition de la croix de Migné eut lieu lors de l'érection d'une croix de mission, et au moment où le prédicateur parlait de la croix apparue à Constantin. Nous sommes en pleine chiasmologie, et l'abbé Vrindts ne pouvait manquer de consacrer une soixantaine de pages à la vision de Constantin. Mais il y montre, comme dans le reste de son livre, un sectarisme navrant.

1855. Le marquis de Mirville défend la vision contre les sceptiques.

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Le marquis Jules Eudes de Mirville, fut un ardent défenseur de la cause spirite, ce qui l'obligeait à combattre les affeux matérialistes et autres rationalistes, qui ne croyaient pas aux merveilles spiritualistes. Dans son livre Des esprits et de laur manifestations fluidiques, il raille ses contradicteurs et prend des exemples qui lui paraissent indubitables, comme la vision de Constantin ou la croix de Migné. Mais pour railler ses adversaires, il utilise le sophisme de l'épouvantail.

1894. L'apologie de l'abbé Desroches

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L'abbé Desroches, archiprètre de Marcigny, consacra un livre à défendre l'apparition du labarum à Constantin, contre les vilains rationalistes qui prétendaient que l'empereur avait été victime d'une hallucination. Mais il fit mieux: Il montra que l'apparition céleste avait eu lieu à moins de cent kilomètres de chez lui, et ainsi offrit à son évêque, une localisation dans son diocèse. On est bien tenté d'appeler cela de l'esprit de clocher. Mais comme l'abbé Duvoisin et l'abbé Vrindts, l'abbé Desroches recourt aux mêmes sophismes stupides.

1905. L'écho du merveilleux reprend les arguments de l'abbé Duvoisin.

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L'écho du merveilleux, comme son nom l'indique, se faisait l'écho de toutes sortes d'histoires, pourvu qu'elles fussent merveilleuses. Dans son numéro 205, il parle de pronostic de guerre (il prévoit la guerre en 1907), de polémiques à propos de Lourdes, d'un prodige récent en Espagne, de Barbiguier de Carpentras et de ses farfadets, de Philippe le Thaumaturge, de la cartomancie fluidique, mais aussi de la vision de Constantin.

1953. Jacques Moreau met les choses au point

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A coté des chercheurs de merveilleux et des apologétistes, il y a heureusement des érudits et des historiens. Des historiens qui ne vont pas chercher à prouver que Constantin a bien été témoin d'un miracle, mais à comprendre ce qui s'est réellement passé. Au milieu du XXe siècle, on avait déja trouvé pas mal d'élements pour éclaircir le problème, et Jacques Moreau va en faire une synthèse qui ne laisse quasiment aucune chance d'être authentique au récit d'Eusèbe.

Dernière mise à jour: 21/10/2023

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